Cinq jours après l'élimination du général Qassem Soleimani, l'Iran a lancé mercredi la riposte contre les Etats-Unis. Téhéran a tiré des missiles contre deux bases abritant des soldats américains en Irak.
Ces raids, revendiqués par Téhéran, marquent un tournant faisant redouter une déflagration généralisée sur le sol irakien, une escalade régionale, voire une guerre ouverte entre Washington et Téhéran.
"Plus d'une douzaine de missiles" ont été lancés depuis l'Iran contre les bases d'Aïn al-Assad et d'Erbil, selon le Pentagone, qui a précisé qu'il évaluait sa "réponse" à l'attaque. Aucune information sur la nature des dégâts ou d'éventuelles victimes n'a été communiquée.
Ces frappes, survenues en trois vagues, ont été menées avec "des dizaines de missiles", ont annoncé les Gardiens de la révolution iraniens, l'armée idéologique de la République islamique cités par la télévision d'Etat iranienne. Téhéran a promis des "réponses encore plus dévastatrices" en cas de nouvelle attaque et menacé de frapper "Israël" et des "alliés des Etats-Unis".
Trump suit la situtaiton
Le président américain Donald Trump, qui a multiplié ces derniers jours les mises en garde à la République islamique, suit la situation "de près" avec son équipe de sécurité nationale", a indiqué la Maison Blanche.
Ces tirs interviennent alors que se terminent à peine les funérailles du général Qassem Soleimani, assassiné vendredi à Bagdad avec l'Irakien Abou Mehdi al-Mouhandis, leader des paramilitaires pro-Iran désormais intégrés aux forces de sécurité irakiennes.
Le président américain et ses ministres ont tenté mardi de dissiper l'impression de sauve-qui-peut provoqué la veille par un cafouillage. "A un moment donné, nous partirons", "mais ce moment n'est pas venu", a assuré Donald Trump. Quasiment au même moment, son ministre de la Défense Mark Esper martelait, lors d'une conférence de presse, que la politique américaine n'avait "pas changé": "Nous ne quittons pas l'Irak".
L'administration Trump avait créé la confusion lundi en transmettant par erreur aux autorités irakiennes une lettre annonçant des préparatifs en vue du retrait de leurs soldats. Ce courrier faisait référence à un vote du Parlement irakien qui a exhorté dimanche son gouvernement à expulser les troupes étrangères d'Irak après la colère provoquée par l'élimination de Soleimani.
Signe d'un dialogue de sourds qui pourrait se prolonger, le Premier ministre démissionnaire irakien Adel Abdel Mahdi a confirmé mardi avoir reçu une lettre "signée" et "très claire" du commandement américain annonçant un retrait militaire.
Fissures dans la coalition
Et pour ajouter au climat d'incertitude, la coalition internationale contre le groupe djihadiste Etat islamique (EI) affiche de premières fissures.
Si la France et l'Italie ont fait savoir leur intention de rester en Irak, les Canadiens et les Allemands ont annoncé mardi le redéploiement d'une partie de leurs soldats vers la Jordanie et le Koweït. L'Otan a décidé de retirer temporairement une partie de son personnel d'Irak.
Après le vrai-faux retrait total des troupes américaines de Syrie, annoncé par Donald Trump à deux reprises depuis un an avant qu'il ne fasse volte-face, il s'agit d'un nouveau coup porté à la lutte contre l'EI, alors que les experts ne cessent de mettre en garde contre une résurgence du groupe djihadiste malgré l'élimination de son "califat" territorial irako-syrien.
Efforts diplomatiques
Le Parlement iranien a adopté en urgence une loi classant toutes les forces armées américaines comme "terroristes" après la mort du général Qassem Soleimani, architecte de la stratégie de l'Iran au Moyen-Orient, souvent considéré comme un héros dans son pays pour le combat contre l'EI.
L'élimination de Soleimani fait également des vagues aux Etats-Unis et au-delà, où fait déjà rage le débat sur la légalité même de la frappe, survenue qui plus est dans un pays tiers. Le président Trump "avait absolument les bases légales appropriées", a répondu son secrétaire d'Etat Mike Pompeo.
Dans l'espoir de parvenir à une "désescalade", plusieurs pays ont multiplié les efforts diplomatiques. Dans un entretien téléphonique avec le président iranien Hassan Rohani, le président français Emmanuel Macron lui a rappelé "l'attachement de la France à la souveraineté et la sécurité de l'Irak" qui "doivent être renforcées par la présence sur son sol de la coalition internationale" antidjihadistes.
La chancelière allemande Angela Merkel s'est elle entretenue de la "situation tendue" avec Donald Trump, tandis le secrétaire général de l'ONU Antonio Guterres a réitéré ses appels à la retenue.
Source / ATS