L'homme de 57 ans était chargé d'évaluer les risques liés au feu dans le foyer pour migrants des Tattes, à Vernier (GE). Mardi, devant le Tribunal de police de Genève, il a rejeté toute responsabilité dans l'incendie tragique qui avait éclaté, en novembre 2014, dans l'un des bâtiments du centre. Un résidant y avait perdu la vie.
Le Ministère public reproche notamment au prévenu, poursuivi entre autres pour homicide par négligence, de ne pas avoir organisé un exercice d'évacuation du bâtiment où l'incendie s'est produit, alors qu'il était en poste depuis 2011. Selon l'accusé, un exercice a bien eu lieu, mais pas sur l'ensemble du site.
La police s'y était opposée, car elle estimait qu'elle ne pouvait pas garantir la sécurité, a expliqué le prévenu, interrogé durant près de quatre heures par le président du tribunal Olivier Lutz. Les deux bâtiments qui abritaient des hommes célibataires ont été exclus du périmètre de l'exercice, a-t-il souligné.
Certains résidants étaient des personnes déboutées ou qui faisaient l'objet d'une non-entrée en matière. Il s'agit d'une population sur laquelle la loi n'a plus de prise, a noté l'accusé. Ces gens ont perdu tout espoir dans le domaine de l'asile et les forces de l'ordre craignaient "des débordements et des mouvements violents".
Une opération compliquée
Par ailleurs, a ajouté le prévenu, un exercice d'évacuation d'un site comme le foyer des Tattes requiert une grande préparation. Il faut aviser le voisinage, les transports publics, les pompiers, la police et même l'Office fédéral des routes (OFROU), car l'autoroute passe à proximité, a-t-il précisé.
Pour les Tattes, il a fallu réécrire trois fois le scénario, a ajouté le prévenu. De plus, selon lui, les personnes sont généralement de passage dans ce foyer. "Il y a beaucoup de roulement". Il n'est pas sûr qu'un exercice d'évacuation conçu à l'avance soit adapté aux résidants présents sur le site au moment T.
Règles communiquées
Le prévenu a aussi indiqué que les règles du foyer étaient communiquées aux résidants à leur arrivée. En outre, des affichettes placardées à divers endroits du foyer rappelaient les consignes. Ces affichettes avaient même été recouvertes de plexiglas afin d'éviter les dégradations.
Parmi les règles figure notamment l'interdiction pour les résidants de cuisiner et de fumer dans les chambres. Devant le juge, l'accusé a noté qu'à l'époque, les confiscations d'appareils étaient presque quotidiennes. Quant à l'interdiction de fumer dans les chambres, la règle était "quasiment impossible à faire respecter".
Outre cet ancien responsable incendie, quatre autres personnes sont jugées pour le drame du foyer des Tattes, deux agents de sécurité et deux anciens occupants du centre. Un résidant était mort asphyxié lors de l'incendie. D'autres personnes, paniquées, avaient sauté par les fenêtres, se blessant gravement pour certaines.
Le procès est programmé jusqu'à jeudi. Mercredi, la première procureure Anne-Laure Huber doit présenter ses réquisitions, suivie des plaidoiries des avocats.