Jeudi 11 décembre 2008 dans la soirée, il y a exactement dix ans : Bernard Madoff, le plus grand escroc de tous les temps, était démasqué à New York. La nouvelle se répandra dans le monde pendant la nuit. Le lendemain 12 décembre à Genève, jour de l’Escalade : c’est la consternation.
Parce que des investisseurs dans les fonds Madoff, il y en avait beaucoup en Suisse. Du côté de Genève en particulier. Alors l’ambiance était glaçante ce vendredi 12 décembre, fête de l’Escalade. Il faisait froid et humide d’ailleurs, avec des averses de neige. Personne ne savait encore que la bombe à fragmentation Madoff allait être le dernier et le plus cruel épisode de la grande crise de 2008.
Du Madoff, tout le monde en voulait dans les années 2000. Ou à peu près. Alors c’était très rationné. Les banques de gestion et les sociétés financières rivalisaient pour pouvoir en donner à leurs clients privés. Et tout d’un coup plus rien. Valeur zéro.
On se souvient même que certaines banques ont dû prendre des mesures d’urgences.
Une en particulier. La Banque Bénédict Hentsch. Créée quatre ans auparavant et basée aux Charmilles. La banque venait de fusionner en septembre avec le fonds Fairfield-Greenwich à New York. Après plus d’un an de négociations. Mais Fairfield, c’était l’un des grands rabatteurs dans le monde pour Madoff. Sans savoir qu’il s’agissait d’une gigantesque pyramide frauduleuse. Fairfield fut quand même mis aussitôt sous enquête aux Etats-Unis.
Et la Banque Bénédict Henstch ?
Elle est parvenue à défusionner d’urgence. En un temps record. A la suite de nouvelles négociations épiques. Du vendredi 12 au dimanche 14 décembre. Les pertes ont tout de suite été annoncées. 56 millions de francs. Elles ne dépassaient pas 5% des actifs gérés par la banque. Cette banque existe toujours d’ailleurs, sous un autre nom : Geneva Swiss Bank, dans le quartier de Sécheron.
Et où en sont, dix ans plus tard, les innombrables procédures auxquelles la méga-fraude Madoff a donné lieu ?
Essentiellement des procédures ouvertes par des clients contre leur banque ou leur gestionnaire de fortune. Qui ne les avaient pas suffisamment mis en garde contre le risque que représente des performances financières élevées et régulières. Des procédures, il y en a eu environ 65 000 dans le monde. Quelques dizaines entre Genève et Lausanne.
Et pour quel résultat ? Il y avait vraiment quelque chose à récupérer ?
C’est même assez surprenant. Les fonds Madoff reposaient sur du vent, mais au moins 37 000 personnes ont été dédommagées dans le monde et en Suisse. Pour un montant de 13 milliards de dollars tout de même. Les avocats en ont bien entendu reçu une part importante.
Cet argent restitué est venu de la liquidation des biens de Madoff. Qui vivait sur un grand pied. Il venait aussi des nombreuses sociétés financières qui ont préféré transiger tout de suite plutôt que de devoir subir un procès médiatisé. A Genève, il y a même eu du pénal. Mais ça n’a rien donné. Sauf que le canton a dû payer plus de deux millions de francs de dédommagement à un financier qui a pu démontrer qu’on ne pouvait rien lui reprocher.