Le nouvel embargo américain sur le pétrole iranien entre en vigueur aujourd’hui. Est-ce qu’il y aura des effets en Suisse ? Sur le prix de l’essence et des huiles de chauffage en particulier ?
En principe pas. Les entreprises suisses du secteur de l’énergie importent surtout des carburants raffinés en Europe. Essence, mazout, kérosène. La part de matière première en provenance d’Iran n’est pas déterminée. L’importation de brut à Cressier, près de Neuchâtel, n’implique pas non plus l’Iran. Et c’est la seule raffinerie active en Suisse.
Sur le plan pétrolier, la Suisse n’a donc pas vraiment à prendre position par rapport aux sanctions américaines. En revanche, une part significative du commerce de pétrole dans le monde passe par des sociétés de trading en Suisse. A Genève en particulier. Ca ne va pas simplifier leur quotidien. Parce que les Etats-Unis ont aussi interdit l’usage du dollar dans les transactions.
Et des effets indirects ? L’Iran est un grand exportateur. L’embargo américain devrait avoir des effets sur les prix du pétrole. Or l’essence a déjà bien augmenté ces derniers mois !
L’Iran est le quatrième exportateur. Derrière la Russie, l’Arabie et les Emirats. Mais il s’agit d’un marché global très fragmenté. Les exportations iraniennes représentent à peine 2% des exportations dans le monde. Et puis la Chine et l’Inde ont annoncé qu’elles feraient partie des Etats ne tenant pas compte de l’embargo américain.
Certains pays dans le monde pourraient même augmenter la part de pétrole en provenance d’Iran. Par solidarité anti-américaine tout simplement. Mais ce ne sera pas le cas des entreprises européennes. Elles ont trop peur d’éventuelles représailles américaines. Même si les transactions avaient lieu en euros plutôt qu’en dollars.
Et les autres exportateurs ? Vont-ils pouvoir compenser le brut iranien sur le marché mondial ?
On compte que c’est la moitié de la production iranienne qu’il s’agira finalement de compenser pour éviter une hausse des prix. C’est-à-dire 1 million de baril par jour environ. Sur 64 millions de barils exportés. L’Arabie a déjà annoncé qu’elle allait augmenter sa production. D’autres devraient le faire.
Sans compter que les Etats-Unis sont la meilleure garantie contre une hausse des prix. Ils redoutent tout simplement que ça ralentisse leur croissance économique. Washington a donc déjà laissé entendre qu’il pourrait y avoir des exemptions à l’embargo sur l’Iran. Sous entendu : si les exportations de pétrole iranien n’étaient pas compensées.
Et combien de temps va durer cet embargo ? On sait que ce genre de mesure est en général peu efficace.
Notoirement inefficaces plutôt. Sauf dans le cas légendaire de l’embargo sur l’Afrique du Sud entre 1976 et 1990. Mais même là, la causalité avec la fin du régime d’apartheid est contestée. Alors nul ne sait combien de temps cet embargo américain sur l’Iran va durer. L’hypothèse la plus répandue ? C’est que ça durera au moins le temps que Trump restera président. Nous voilà bien avancés…