En comparaison européenne, la Suisse fait partie des cancres en matière de prévention du tabagisme. Elle figure au 35e et avant-dernier rang du classement établi par l'Association des ligues européennes contre le cancer.
La Suisse reçoit notamment la plus mauvaise note en matière de restriction de la publicité pour le tabac. En 2016, le Parlement avait renvoyé au Conseil fédéral un premier projet de loi, principalement en raison des mesures d'interdiction prévues en matière de publicité. Il débat depuis d'une nouvelle mouture.
Mais il "s'obstine, dans de nombreux cas, à maintenir le statu quo ou ne préconise que des améliorations timides en matière de protection des enfants et des adolescents, qui sont déjà dépassées dans la plupart des pays européens", dénonce l'Association suisse pour la prévention du tabagisme (AT) dans un communiqué publié vendredi.
Par ailleurs, le Conseil fédéral a recommandé en décembre le rejet de l’initiative populaire "Oui à la protection des enfants et des jeunes contre la publicité pour le tabac". Il souhaite protéger les jeunes, mais estime que le texte va trop loin et ne veut pas de contre-projet.
L'exemple britannique
Au total, la Suisse, "patrie des multinationales du tabac", a obtenu 41 points sur les 100 possibles dans le classement européen "Tobacco Control Scale", contre 46 dans la dernière édition du classement en 2016. Elle a perdu 14 places. Le nombre de fumeurs s'est stabilisé à un niveau élevé depuis 2007, à 27% de la population helvétique. Un niveau qui monte à 32% chez les adolescents et les jeunes adultes.
A l'inverse, le Royaume-Uni, premier du classement, a vu la proportion de fumeurs adultes baisser de 5% depuis 2011, pour s'établir à 15% en 2018. En Irlande, troisième derrière la France, elle est passée de 23% à 17% entre 2015 et 2019.
L'AT salue diverses mesures prises en 2014 par l'Union européenne, et qui "vont bien au-delà des mesures prises en Suisse". Elle cite en exemple l'interdiction à partir du 20 mai de la vente de tabacs aromatisés - qui séduisent en particulier les jeunes - ou celle de substances favorisant l'inhalation (et donc la dépendance à la nicotine), entrée en vigueur en 2016.
L'association rappelle également que, ces trois dernières années, huit pays européens ont introduit des paquets de cigarettes à emballage neutres ou sont en train de mettre en œuvre cette "mesure très efficace, que le lobby du tabac combat par tous les moyens".
"Le Far West"
L'AT déplore par ailleurs que le Conseil fédéral n'ait plus le pouvoir d'augmenter l'impôt sur le tabac. Le parlement a bloqué en 2013 ce mécanisme de protection, alors que des taxes élevées "sont le moyen le plus efficace de réduire la consommation" de tabac, en particulier chez les jeunes.
En Europe, en revanche, les Etats utilisent l'imposition comme un instrument de santé publique. La moitié des pays de l'UE prélèvent aujourd'hui un impôt de 75% ou plus sur un paquet de cigarettes. En France, un paquet de cigarettes coûtera en moyenne 10 euros à partir de novembre.
Quant au domaine des cigarettes électroniques, "c'est le Far West", dénonce l'AT. Il n'existe actuellement aucune base légale au plan national. Elle ne sera introduite qu'avec la loi sur les produits du tabac, éventuellement dans deux ou trois ans. Pour l'heure, seul le Valais et Bâle-Campagne ont fixé un âge minimum pour la vente de cigarettes électroniques.