En cette fin d’année 2018, on dénonce beaucoup d’injustices.
Les gilets jaunes descendent dans la rue pour dénoncer le prix de l’essence. Les syndicats de la construction bloquent le pont du Mont-Blanc pour dénoncer le dumping salarial. Les féministes dénoncent les violences faites aux femmes en marchant dans toutes les villes de Suisse et du monde.
Je ne voudrais pas laisser 2019 arriver sans dénoncer une autre grande injustice: les ronflements.
Parce que si vous allez peut-être vous reposez pendant les vacances de Noël, il y en a qui ne vont pas se reposer du tout : ce sont les femmes en couple avec des hommes qui ronflent.
Vous vous souvenez de ce sketch de Florence Foresti intitulé «La Poussette»? Un sketch fantastique où on la voyait tenter de plier une poussette en pestant. Je la cite: «On en parle, de la poussette? Ça dérange personne? On est en 2010, on fait du feu avec un iPhone... Mais on peut toujours pas plier ça! (...) Il y a pas un décalage technologique? Enfin ! Y a-t-il des gens qui sont payés pour fabriquer ça?! ... C'est forcément des hommes qui n'aiment pas les femmes! (...) Il y a vengeance, là... si c'était un accessoire masculin, ça ferait longtemps que... (bruit de robot) "Verrouillage électronique !"
Les ronflements, c’est exactement la même chose. Qui ronfle? Les hommes, en immense majorité. Qui donc est victime des ronflements? Les femmes, en immense majorité!
On en parle, de cette majorité silencieuse? Non!
On descend dans la rues pour ces victimes? Non!
On s’en occupe, de ce problème? Non!
Et ça vous empêche de dormir ? Non, bien sûr! Et bien moi, oui!
On est en 2018 et un homme qui ronfle comme une locomotive, c’est le même que l’homme de Cro-Magnon qui ronflait comme une locomotive. En deux mille ans, que dis-je en dix mille, cent mille ans, aucun progrès! Rien! Les mêmes décibels, le même bruit, les mêmes grognements, le même empêchement de dormir pour tous ceux qui partagent sa couche et son espace vital.
Les docteurs prescrivent bien quelques sprays pour les narines, quelques tortionnaires ont imaginé des masques à oxygène à porter pendant la nuit - qu’évidemment personne ne porte -, mais en 2018, les femmes victimes des ronflements de leur conjoint n’ont que leurs yeux pour pleurer et leur canapé pour dormir.
Cher Philippe, imaginez l’inverse maintenant. Que ce sont les femmes qui ronflent en majorité, et les hommes qui sont victimes des ronflements de femmes, et dorment sur le canapé un jour sur deux - pensez-vous vraiment que depuis Cro-Magnon, nous n’aurions pas trouvé une solution? Pensez-vous vraiment que le ronflement serait toujours le pire cauchemar de la moitié de l’humanité?
Evidemment que non.
Je peux le prouver.Car pensez-vous que la voiture roulerait si elle n’avait pas été destinée, d’abord, aux hommes? Pensez-vous vraiment que les avions voleraient s’ils n’étaient pas d’abord des joujoux pour grands garçons? La Playstation existerait seulement si elle n’était pas d’abord faite pour que les papas y jouent avec leurs garçons chéris? D’ailleurs, vous remarquerez qu’il n’y a toujours pas d’aspirateur automatique dans les maisons, que c’est toujours un, généralement une être humain qui le pousse et le tire dans les appartements. Par contre, regardez les pelouses des jardins: qui s’occupe habituellement de tondre le gazon? Papa. Et où y a-t-il de jolis robots tondeurs d’herbes? Au jardin!
CQFD.
Je vous l’affirme: si les femmes ronflaient, il y a longtemps que le problème serait résolu.
Que faire? Bien mieux qu’une grève du sexe, comme l’envisage une branche féministe pour la prochaine journée des femmes, mesure qui pénalise tout le monde, je suggère une action concertée baptisée «A fond les ronflements». Une semaine. Ça suffit pour créer l’enfer au lit. Pas un soir de plus, sinon toutes les femmes finiraient étranglées par leur conjoint excédé. Et vous verrez, la pilule miracle, on l’aura.