La Fondation pour l’attractivité du canton de Genève (FLAG) a publié son enquête qualitative 2025. Si les fondamentaux du canton restent solides, ils estiment que les freins structurels s’accentuent. Mobilité, fiscalité, administration, climat politique: les signaux d’alerte se multiplient, poussant de nombreuses entreprises à envisager un départ.
Réalisée auprès de 88 dirigeants et dirigeantes représentant près de 30’000 emplois, l’étude met en lumière une tension croissante entre les atouts historiques du territoire et les obstacles auxquels les entreprises sont confrontées au quotidien.
Si la qualité de vie, la stabilité institutionnelle et l’écosystème international de Genève sont unanimement salués, ces éléments ne suffisent plus à maintenir l’avantage compétitif du canton. Les difficultés liées à la mobilité, à la fiscalité, à la complexité administrative et à un sentiment de sécurité en recul constituent aujourd’hui des freins structurels majeurs pour la fondation.
L’une des préoccupations les plus marquantes dans l'étude reste la fiscalité. Plus de 90% des dirigeants interrogés la jugent « élevée » ou « trop élevée », en particulier en ce qui concerne la taxation de l’outil de travail.
En parallèle, 34 % des répondants disent avoir envisagé de délocaliser le siège de leur entreprise, une proportion en hausse de 5% par rapport à 2022. Près de 30% indiquent même avoir été activement démarchés par d’autres cantons ou pays, illustrant une concurrence de plus en plus agressive.
La concurrence ne se joue plus seulement entre pays: elle est intercantonale, quotidienne et stratégique
Gilbert Ghostine, président de la Fondation.
« Des places comme Zoug, Zurich, Singapour ou Dubaï déploient des efforts considérables pour attirer entreprises et talents. Mais Genève dispose de tous les atouts pour se hisser parmi les premières places, à condition de les mobiliser pleinement, de simplifier notre environnement et d’agir avec ambition. »
Au cœur des inquiétudes figure l’initiative populaire fédérale « Pour l’avenir », qui propose d’instaurer un impôt de 50 % sur les successions et donations supérieures à 50 millions de francs. 94,3 % des dirigeants y sont opposés, et 80 % des personnes concernées envisageraient de quitter la Suisse si elle était adoptée.
Nous sommes face à un risque majeur
Karine Curti, directrice de la Fondation.
« Introduire un impôt de 50 % sur les successions enverrait un signal extrêmement négatif aux entrepreneurs, aux investisseurs et à toutes les entreprises à caractère familial. Un tel projet créerait une incertitude fiscale durable, au moment même où Genève doit consolider sa compétitivité. »
Selon les chiffres du Conseil d’État, 362 contribuables genevois seraient concernés, rapportant actuellement 1,286 milliard de francs aux finances publiques. Les conséquences anticipées vont de la délocalisation de sièges à la vente forcée d’entreprises familiales.
La mobilité se détache nettement comme le principal frein opérationnel au quotidien: près de 80 % des dirigeants interrogés dénoncent la congestion, les chantiers mal coordonnés, les liaisons ferroviaires insuffisantes ou encore le manque d’alternatives efficaces.
Quand chaque trajet devient une épreuve, ce n’est pas seulement la productivité qui en souffre
Aude Jacquet Patry, membre du Conseil de fondation.
« Perte de temps, stress pour les collaborateurs, difficulté à acheminer des marchandises ou à trouver des places de stationnement : la mobilité n’est plus un détail logistique, c’est un enjeu économique majeur. »
L’enquête révèle également un rejet quasi unanime de la complexité administrative: près de 80% des répondants dénoncent des procédures trop longues et inadaptées, qui freinent l’innovation et mobilisent des ressources précieuses.
Simplifier les procédures, fluidifier les échanges avec l’administration et adopter une approche plus partenariale seraient déjà un formidable moteur de compétitivité.
Carole Hubscher, membre du Conseil de fondation « Ce ne sont pas les idées ni les projets qui manquent, mais bien le temps et l’énergie perdus dans des démarches administratives trop complexes »
Autre indicateur préoccupant de l'étude: la sécurité. Près de 70% des chefs d’entreprise estiment que la situation s’est dégradée ces trois dernières années pour ce critère décrit comme stratégique. Une détérioration plus marquée pourrait même conduire près de la moitié des dirigeants à envisager un départ du canton. La Fondation appelle à une politique de sécurité proactive, fondée sur une meilleure coordination et une présence renforcée sur le terrain.
Face à l’accumulation des signaux d’alerte, la Fondation FLAG demande une accélération des réformes à Genève. « La compétitivité de demain ne se jouera plus seulement sur la capacité à planifier, mais à décider et à concrétiser », résume le rapport.
Avec IA