Plus de 170 pays sont réunis pour dix jours à Genève pour tenter d'arracher un accord "historique" contre la pollution plastique. A l'ouverture des discussions mardi, la Suisse a appelé à envoyer "un signal fort pour le multilatéralisme".
"Nous voulons mettre un terme à la pollution plastique. Nous voulons protéger la santé humaine et l'environnement. Et nous voulons le faire maintenant", a affirmé la cheffe de l'Office fédéral de l'environnement (OFEV) Katrin Schneeberger.
"Le moment est largement venu d'atteindre un accord", a renchéri la directrice exécutive du Programme des Nations Unies pour l'environnement (PNUE) Inger Andersen. Elle en a également appelé à la "responsabilité" des Etats.
En près de 25 ans, la consommation de plastique a plus que doublé et s'établissait au total, selon les estimations pour 2024, à 500 millions de tonnes, dont près de 400 millions finissent en déchets. Si la situation n'est pas stabilisée, elle sera multipliée encore par trois d'ici 2060, au-delà de 1,2 milliard de tonnes. Tout comme les déchets, à plus d'un milliard de tonnes.
"Pour la première fois, un instrument légalement contraignant pour mettre un terme à la pollution liée à la plastique est à portée de main", a déclaré le président des négociations, l'ambassadeur équatorien Luis Vayas Valdivieso. "L'urgence est claire", a-t-il ajouté tout en faisant preuve d'optimisme sur le résultat des pourparlers.
Pays pétroliers à convaincre
Face à un "problème mondial", il faut des "solutions mondiales", estime également Mme Schneeberger. "Même les politiques nationales les plus ambitieuses ne suffiront pas" sans effort international commun, a ajouté la directrice de l'OFEV.
Il faudra toutefois convaincre les quelques pays pétroliers qui ont bloqué le processus il y a quelques mois en Corée du Sud d'accepter un accord sur tout "le cycle" du plastique, de la production à la gestion des déchets.
De leur côté, les réfractaires, notamment la Russie, accusent les Etats les plus ambitieux, dont fait partie la Suisse, de vouloir leur faire peser sur eux la charge des efforts. "C'est compliqué, la voie est étroite, mais elle existe", a dit à la presse Mme Andersen.
Selon elle, la marge de manoeuvre dépendra de comment les différentes parties voient ce que signifie "tout le cycle" du plastique. Tout comme une production et consommation durables. "Ces deux volets doivent aller de pair", ajoute de son côté la cheffe de l'OFEV.
Ces derniers mois, les Etats ambitieux sont allés dans la direction des autres pays pour tenter d'arracher un accord qui serait considéré comme historique. Désormais, aucune limite chiffrée de la production de plastique ne sera imposée, une situation qui pourrait fâcher les ONG. "Je ne dirais pas que cette question est réglée", nuance Mme Andersen.
Rösti attendu à Genève
La Chine, plus gros producteur, et les Etats-Unis, deuxièmes, souhaitent un accord même s'il a des conséquences économiques. L‘attitude américaine, en raison de l‘imprévisibilité de l’administration de Donald Trump, pourrait toutefois être volatile.
L'objectif des Etats ambitieux est avant tout d'éviter une explosion de ces matériaux plutôt que de vouloir obtenir une interdiction qui serait irréaliste, admettent plusieurs acteurs. Autre divergence à régler, le mécanisme de financement pour aider les pays en développement à appliquer un accord n'est pas décidé.
Mais pour les ONG, il faut rester ferme sur les principes établis en 2022. Greenpeace Suisse demande une diminution considérable du plastique, alors que que cette substance se retrouve dans les écosystèmes et les êtres humains. "Pour protéger le climat, la biodiversité et la santé des êtres humains, il faudrait une réduction d'au moins trois quarts", a affirmé une de ses responsables, Joëlle Hérin, à Keystone-ATS.
ll faut "un signal clair qu'on ne veut plus continuer avec une production exponentielle" et pour lutter contre la pollution liée à cette substance, estime de son côté le chef négociateur pour la Suisse, le chef des affaires internationales à l'OFEV Felix Wertli. Pour les derniers jours des discussions, les 13 et 14 août, le conseiller fédéral Albert Rösti et plusieurs dizaines de ses homologues doivent se rencontrer informellement.
La réunion de Genève est considérée comme celle de la dernière chance. Mais Greenpeace Suisse souhaite une prolongation si les divergences restantes n'étaient plus que résiduelles au terme des dix jours de négociations. A défaut, une coalition de plusieurs Etats pourrait aussi décider de lancer son propre accord en dehors du cadre de l'ONU. Mais la portée serait alors très affectée.