L'opposition pro-européenne est donnée en tête de législatives cruciales pour l'avenir de la Géorgie, devant le parti au pouvoir, accusé de dérive autoritaire pro-russe, selon un sondage à la sortie des bureaux de vote samedi.
D'après cette étude de l'institut américain Edison Research réalisée pour une chaîne de télévision favorable à l'opposition, quatre partis pro-européens qui se sont mis d'accord pour former une coalition ont remporté un total de 51,9% des suffrages, contre 40,9% pour le Rêve géorgien, le parti dirigé par le milliardaire Bidzina Ivanichvili.
Bruxelles a averti que l'issue de ces élections permettrait de connaître les chances d'entrer dans l'UE de cette ancienne république soviétique du Caucase d'environ quatre millions d'habitants, qui a inscrit cette aspiration dans sa Constitution.
Dans un message vidéo, la présidente pro-européenne, Salomé Zourabichvili, en rupture avec le gouvernement, s'était inquiétée dans l'après-midi d'"incidents violents profondément préoccupants (...) dans différents bureaux de vote". Après avoir voté, elle avait prévenu que ce scrutin allait "déterminer l'avenir du pays".
Parmi le quatuor de partis d'opposition concernés se trouve le Mouvement national uni de l'ex-président emprisonné Mikheïl Saakachvili, l'ennemi juré de M. Ivanichvili.
Risque de troubles
Surveillé par des observateurs internationaux, le scrutin a été marqué par plusieurs incidents, largement relayés en ligne.
Une vidéo sur une bagarre dans un bureau de vote à Tbilissi a poussé Mme Zourabichvili à demander au ministre de l'Intérieur d'agir.
Des échauffourées ont également eu lieu au siège du Mouvement national uni.
L'association des jeunes avocats, qui surveille ces législatives, a fait état de "violations électorales significatives".
Des images semblant montrer un bourrage d'urnes à Sadakhlo, un village de l'est, ont été très partagées par l'opposition. La commission électorale a annulé les bulletins dans ce bureau.
L'opposante Tina Bokoutchava a accusé les "voyous" du Rêve géorgien de "s'accrocher au pouvoir" et de "miner le processus électoral", des propos rejetés par ce parti.
"Bien-sûr que j'ai voté pour l'Europe, parce que je veux vivre en Europe, pas en Russie. Donc j'ai voté pour le changement", a dit Alexandre Gouldani, un étudiant de 18 ans, après avoir déposé son bulletin dans l'urne.
Un autre électeur, Giga Abouladzé, a fait le choix inverse, considérant que le Rêve géorgien travaille "pour le peuple" et qu'il faut être "ami" avec l'Europe mais aussi avec Moscou.
Gela Vasadzé, un expert du Centre d'analyse stratégique sur la Géorgie, a prévenu d'un risque de "troubles post-électoraux", si "le parti au pouvoir tente d'y rester quel que soit le résultat".
En cas de victoire, l'alliance d'opposition a promis des réformes électorales, judiciaires et l'abrogation de lois décriées promulguées il y a peu.
Elle envisage de former un gouvernement de coalition puis d'organiser un nouveau scrutin d'ici à un an pour mieux refléter la volonté des électeurs.
Le Rêve géorgien, au pouvoir depuis 2012, est accusé de s'être engagé dans une spirale vers un régime autoritaire prorusse et d'éloigner la Géorgie de l'Union européenne et de l'Otan, à laquelle elle ambitionne également d'adhérer.
Crainte d'une "Ukrainisation"
Certains de ses dirigeants sont très critiques envers l'Occident. Bidzina Ivanichvili l'a qualifié de "parti mondial de la guerre", qui traiterait la Géorgie, sa victime, comme de la "chair à canon".
Ce pays riverain de la mer Noire reste très marqué par une brève guerre en 2008 avec l'armée russe.
A son issue, la Russie a installé des bases militaires dans deux régions séparatistes géorgiennes, l'Abkhazie et l'Ossétie du Sud, dont elle a reconnu l'indépendance unilatéralement proclamée.
Dans ce contexte, le Rêve géorgien a fait campagne en se présentant comme seul capable d'empêcher une supposée "Ukrainisation" de la Géorgie.
Le gouvernement disait avant le scrutin vouloir obtenir les trois quarts des sièges du Parlement, ce qui l'aurait mis en position de modifier la Constitution et, en vertu de son projet, d'interdire les partis d'opposition pro-occidentaux.
La Géorgie a été secouée en mai par de grandes manifestations contre une loi sur "l'influence étrangère", inspirée d'une législation russe sur les "agents de l'étranger" utilisée pour écraser la société civile.
Bruxelles a gelé dans la foulée le processus d'adhésion de la Géorgie à l'UE et les Etats-Unis ont pris des sanctions contre des responsables géorgiens.
Autre cause de tensions avec les Occidentaux : la récente promulgation d'une loi restreignant fortement les droits des personnes LGBT+ en Géorgie, un pays de tradition chrétienne orthodoxe où l'hostilité envers les minorités sexuelles demeure forte.
Cet article a été publié automatiquement. Sources : ats / afp