Les ministres en charge des affaires européennes des pays membres de l'Union ont diffusé hier un communiqué de routine qui fait le point sur les relations avec la Suisse. Vous en avez quand même examiné tous les recoins.
Oui Philippe, un communiqué de routine à l’issue d’une réunion de routine. Mais je ne suis certainement pas seul à l’avoir lu deux fois pour m’assurer que rien ne manquait. Eh bien rien ne manquait. L’Union européenne ne voit que de bonnes choses dans ses relations avec la Suisse. Elle a juste précisé qu’elle soutenait l’accord cadre que le Conseil fédéral a mis en consultation en début d’année.
En tout cas le ton a changé par rapport à d’autres prises de position du côté de Bruxelles.
Oui, aucune menace en particulier. Il faut dire qu’il ne s’agit pas du tout des mêmes personnes. La Commission Européenne et son président Juncker se sont souvent montrés nerveux et intimidants. Et d’après ce que j’entends, ils le sont encore beaucoup plus off the record, en aparté. Surtout les fonctionnaires français en poste à Bruxelles paraît-il.
Là, il s’agit de ministres aux Affaires européennes dans leur pays, pour lesquels la Suisse n’est souvent qu’un dossier lointain et assez secondaire. Le langage est très diplomatique.
Et ça sonne bizarrement dans le climat actuel autour de ces questions en Suisse.
Complètement. Mais vous savez, tout sonne bizarrement aujourd’hui en Suisse. Même le silence. L’accord cadre est dans une impasse politique homologuée. On est en année électorale, aucun parti important ne veut prendre des risques avec ça. On temporise avec la consultation.
Et puis il y a les élections européennes en mai, avec de gros enjeux électoraux dans chaque Etat membre. Et puis il y aura le renouvellement de la Commission européenne. Ca portera en automne.
Autant dire qu’il ne va rien se passer cette année.
A Bruxelles, 2019 est déjà considérée comme une année perdue. Il n’y a pas de raison qu’elle ne le soit pas aussi en Suisse. C’est pour cela qu’il fallait finaliser avant la fin de l’année dernière. Tout le monde l’a dit. Ce qui est bizarre, c’est de devoir traverser maintenant ce désert en ayant l’air de faire quelque chose.
L’Union patronale suisse, elle, ne donne pas du tout l’impression de temporiser.
Non, mais ils sont un peu seuls. Les milieux économiques détestent les cycles électoraux qui suspendent tout pendant des mois. Alors l’UPS a diffusé un communiqué précisant qu’elle était en train d’examiner des solutions pour débloquer la situation. Il s’agira probablement d’offrir quelques chose à la gauche. Mais on voit mal la gauche fléchir cette année encore dans son refus d’accord-cadre.
Ce que les entreprises redoutent surtout, c’est ce qui va se passer fin juin avec l’équivalence boursière. Si Bruxelles met sa menace à exécution, et elle l’a déjà reportée une fois, le risque de réaction en chaîne politique n’est pas mince côté suisse. Attention aux dégâts politiques irréversibles. Parce qu’il faudra bien un jour que cet accord-cadre soit soumis à votation.