Les populations du globe ne disposent pas toutes d’une immunité identique pour se défendre contre le coronavirus. Une étude internationale avec participation genevoise a fait la comparaison et identifié les variants génétiques potentiellement les plus efficaces.
Des scientifiques de l’Université de Genève (UNIGE), en collaboration avec l’Institut Max Planck de Jéna (Allemagne) et l’Université d’Adélaïde (Australie), se sont penchés sur les gènes dits HLA, responsables du système immunitaire adaptatif. Ils ont la particularité de différer souvent entre individus.
Ces gènes produisent des molécules HLA (Human Leukocyte Antigen, ou antigènes des leucocytes humains) qui se placent à la surface des cellules. Lorsqu’un virus infecte un organisme, les protéines de l’envahisseur sont d’abord découpées en petits fragments appelés peptides.
Les molécules HLA se lient ensuite à ces fragments et les exposent à la surface des cellules, déclenchant ainsi une cascade de réactions immunitaires destinées à éliminer le virus.
"Nous avons cherché à identifier, parmi les quelque 450 molécules HLA les plus communes dans des centaines de populations à travers le monde, celles qui se lient le plus fortement aux peptides du nouveau coronavirus", explique Alicia Sanchez-Mazas, professeure à l’Unité d’anthropologie de l’UNIGE, citée mercredi dans un communiqué de cette dernière.
Classification des molécules HLA
Plus de 7000 peptides peuvent être dérivés de l’ensemble des protéines virales du coronavirus. La chercheuse et son équipe internationale ont utilisé des outils bioinformatiques permettant de prédire des forces de liaison entre les molécules HLA et les peptides sur la base de leurs propriétés physico-chimiques. Des modèles statistiques ont ensuite été utilisés pour comparer les fréquences de ces variants dans les différentes populations humaines.
En classant les 450 molécules HLA selon leur capacité plus ou moins forte à lier les peptides du coronavirus, l’étude fournit un inventaire de référence essentiel pour identifier les susceptibilités ou résistances génétiques plus ou moins grandes des individus face au virus. Elle montre également que la fréquence de ces variants HLA diffère de manière significative d’une population à l’autre.
"Il ne faut cependant pas en tirer des conclusions trop hâtives. Les molécules HLA contribuent à la réponse immunitaire mais elles ne sont de loin pas les seuls éléments permettant de prédire une résistance efficace ou non à un virus", souligne José Manuel Nunes, de l'UNIGE, co-auteur de la publication.
Molécules "généralistes"
Dans la même étude, les auteurs ont aussi analysé les liaisons HLA-peptides pour la totalité des protéines de 6 autres virus à potentiel pandémique (2 autres coronavirus, 3 virus influenza de la grippe et le virus HIV-1 du sida).
Il en ressort que de nombreux variants HLA sont capables de se lier fortement aux peptides de l’ensemble des 7 virus étudiés. D’autres font de même pour tous les virus de type respiratoire (coronavirus et influenza). Cela signifie donc qu’il existe de nombreuses molécules HLA "généralistes", efficaces contre de nombreux virus différents.
Une suite logique à cette étude sera de déterminer quels sont précisément les peptides du coronavirus qui sont le plus fortement liés aux molécules HLA. Ce sont en effet ces peptides qui auront les plus fortes chances de déclencher une réaction immunitaire efficace. Leur identification sera une information essentielle pour le développement d’un vaccin. Ces travaux sont publiés dans la revue HLA.