Au deuxième jour du procès des six policiers lausannois prévenus d'homicide par négligence dans l'affaire de la mort de Mike en 2018, plusieurs témoins ont été entendus mardi, dont la femme et le frère du Nigérian. Ils ont demandé que "justice parfaite soit faite".
A l'issue d'un procès qui doit durer quatre jours, le Tribunal correctionnel de l'arrondissement de Lausanne, délocalisé à Renens, doit juger si ces six policiers ont réagi de façon proportionnée ou non lorsqu'ils ont interpellé Mike Ben Peter, lors d'un contrôle antidrogue en février 2018.
Ce Nigérian de 40 ans était décédé d'un arrêt cardio-respiratoire après une interpellation musclée. Les policiers risquent jusqu'à trois ans de prison. La défense plaidera leur acquittement.
"Complètement dévastée"
Suspendu lundi soir après que les policiers ont été interrogés par plusieurs parties et ont dit avoir agi de manière proportionnée, la journée de mardi était consacrée à l'audition de dix témoins. Le temps fort et bouleversant a été les témoignages de la femme et du frère de Mike. Trois policiers ont, eux, exprimé leurs condoléances.
Pour la veuve, en pleurs, le décès de son mari a été "un désastre, comme si ma vie était finie. J'étais complètement dévastée, seule avec mes deux enfants et enceinte d'un troisième". Cinq ans après les faits, elle déclare "attendre qu'une justice parfaite soit faite".
Elle a décrit Mike, rencontré en 1999, comme "une bonne personne, charmante, empathique, calme et très responsable". "C'était un père aimant, heureux d'être papa, qui faisait beaucoup de choses et jouait beaucoup avec eux, préparait leurs repas", a-t-elle raconté.
"J'ai donné naissance à l'époque à un enfant qui ne pourrait jamais connaître son père. Le plus douloureux, c'est quand il me demande quand son père va revenir (...) Il me pose la question chaque jour et ça me fait à chaque fois pleurer", a-t-elle dit.
"On l'appelait papa"
Le frère de Mike a aussi pris la parole. Il a expliqué que la famille était composée de neuf frères et soeurs et que depuis la mort de leur papa en 1995, Mike, "le frère aîné aimé", avait pris le rôle de père de famille. "Il était très soutenant auprès de ma mère et de nous tous. On l'appelait papa. Il voulait aussi assurer une bonne éducation pour ses nièces et neveux", a-t-il raconté.
Depuis le décès de Mike, "toute ma famille est dans la douleur. Ma mère s'est évanouie quand elle a appris la nouvelle. Elle est ensuite décédée d'une crise cardiaque deux mois après les funérailles, à 65 ans", a ajouté le frère. "Toute notre famille se sent très mal. Je vous en supplie, nous avons besoin de justice. Si mon frère obtient justice, son âme pourra reposer en paix".
Condoléances de trois policiers
Après l'audition de la veuve et du frère, trois policiers ont tenu à s'exprimer en se tournant face à eux. "Ma sensibilité me fait connaître la douleur de quelqu'un qui perd un proche. C'est inquantifiable, incommensurable. J'ai entendu dans vos récits à quel point votre douleur est encore vive. Son décès m'a touché très profondément. Je veux vous présenter mes condoléances et j'espère que vous mesurez la sincérité de mes propos", a dit l'un d'eux.
Deux collègues ont fait pareil, exprimant condoléances et sympathies par rapport à "la douleur que vous vivez". "Cela me tenait à coeur", a dit l'un, "Je suis navré pour tout ça", a ajouté l'autre.
"Maintenu avec vigueur"
Auparavant, dans la matinée, un ressortissant français avait livré son témoignage. Logeant dans un immeuble proche de la scène, près de la gare, il a dit avoir entendu des "cris particuliers, de plus en plus puissants, de l'ordre de l'urgence, des cris de douleur plus que de quelqu'un qui lutte".
Il a expliqué avoir vu depuis la fenêtre de sa chambre Mike maintenu "fermement" et avec "vigueur" au sol: quatre policiers, deux de chaque côté, au niveau du haut du corps, et deux autres au niveau des jambes.
Ce témoin n'a pas pu préciser exactement comment Mike était tenu ni comment les policiers s'appuyaient ou non sur lui. "Il me semblait maîtrisé. J'ai été frappé par le nombre de policiers", a-t-il dit. Il n'a pas pu s'exprimer sur la taille ou le poids de la victime.
Il a terminé son témoignage en disant que la tentative de réanimation avait duré environ 30 minutes puis que la victime avait été laissée seule à terre et recouverte d'une couverture technique. "Il est clair pour moi que la réanimation avait échoué et que la personne était décédée", a-t-il relevé.
Verdict jeudi prochain
Parmi les autres témoins de la journée, le numéro deux de la Police municipale de Lausanne, l'épouse, un ami et quatre collègues de policiers. Ces six derniers ont tous évoqué des caractères "calmes, posés, respectueux, loyaux" ou encore "bienveillants".
Le procès se poursuit mercredi avec l'interrogatoire des policiers par leurs propres avocats. Les plaidoiries ont été déplacées à lundi et le verdict est attendu jeudi 22 juin a priori.
Cet article a été publié automatiquement. Source : ats