Ouverture du procès ce mardi d’un Genevois accusé d’avoir fait assassiner un compatriote aux Philippines en octobre 2014. Il avait pour projet d’ouvrir un bar dans ce pays avec la victime. Celle-ci a été retrouvée morte, tuée d’un coup de couteau dans le cœur, sur l’île de Mindanao. L’accusé aurait payé les tueurs avec l’argent de son futur associé, qui avait amené ce cash pour l’ouverture du bar.
L’accusé conteste tous les faits qui lui sont reprochés. Il est jeune, il a 24 ans. Malgré sa corpulence plutôt imposante, il répond presque avec timidité aux questions de la juge du tribunal criminel, Sabina Mascotto, à la manière d’un tout jeune garçon. L’accusé parle parfois dans sa barbe et la juge lui fait souvent répéter.
Ses parents se divorcent lorsqu’il a 6 ans, et il vit avec sa mère et son beau-père à Genève. A 13 ans, il rejoint son père en France, et fait deux ans d’internat à Nimes. En 2009, il revient chez sa mère où il cumule les petits boulots. Un emploi à Mobilzone qui se termine par une plainte de son employeur pour vol…alors qu’il est encore mineur…grâce aux mesures de réinsertion, il travaille ensuite dans l’informatique et dans divers restaurants.
En 2013, il part aux Philippines pour un emploi dans un resort. Là-bas, il se lie avec une femme qui lui annonce en novembre qu’elle est enceinte. Sa fille Serena naît en 2014. «A chaque fois que j’avais besoin d’argent, je demandais à ma famille », déclare l’accusé. Une généreuse grand-mère mais aussi sa mère l’aident. Pour les couches de son bébé et pour le lait en poudre.
Puis il décide d’ouvrir un bar aux Philippines avec un ami suisse.
Un futur associé qui verse sur le compte du prévenu, en septembre 2014, plus de 11'000 francs suisses dans la perspective de prendre un bar sur une des îles. Mais l’associé meurt un mois plus tard d’un coup de couteau dans le cœur, sur l’île de Mindanao. Selon l’acte d’accusation, le prévenu aurait attiré la victime sous prétexte d’acheter du matériel pour le fameux bar. L’accusé aurait ensuite conduit la victime sur une route isolée. Des tueurs à gage, engagés par le prévenu, l’y attendaient. C’est là qu’ils s’en sont pris à la victime, lui assénant un coup de couteau fatal dans le cœur.
L’audition de l’accusé se poursuit cet après-midi.
Et l’accusé nie tous les faits. Selon sa version, son associé aurait été tué par des Philippins pour lui voler son cash. Il aurait voulu acheter une arme à feu dans l’île de Mindanao. Et là, tout aurait dérapé. Des hommes à moto l’auraient attaqué au couteau. Le prévenu affirme avoir également reçu des menaces répétées de la part de la victime elle-même, durant le mois de septembre 2014. Des menaces contre lui-même, sa famille en Suisse mais aussi contre sa compagne philippine et sa fille Serena. L’interrogatoire de la juge se poursuit.
"C'est elle qui a tout manigancé"
L'accusé est renfermé, changeant. Il modifie sa version des faits au gré des questions…de la juge d’abord, du procureur ensuite. Il est question des nombreux messages retrouvés sur son téléphone Samsung, durant le mois précédent le meurtre et le jour même. Des sms retrouvés récemment, grâce aux avancées technologiques. Ils avaient été effacés avant qu’il ne soit entendu en 2014 comme prévenu par la police, juste après son retour des Philippines.
« Je ne suis pas l’auteur de ces messages» déclare l’accusé à la juge du tribunal criminel. Ils seraient l’œuvre de sa compagne philippine, la mère de sa fille. «Elle me faisait du chantage et je lui ai versé 5'000 francs en 2015, c’est elle qui a tout manigancé!». Devant le tribunal, il charge son ex-compagne et clame son innocence. Les imprécisions successives du prévenu, ses réponses approximatives laissent planer un sérieux doute sur ses déclarations. La salle est perplexe. En fin de journée, lorsque son père vient à la barre pour témoigner, l'accusé s'effondre, la tête entre les mains.