Le conseiller d'Etat genevois Mauro Poggia est intervenu auprès des médecins des Hôpitaux universitaires genevois (HUG) qui refusaient d'opérer une patiente de 90 ans souffrant d'une péritonite avancée. Selon nos informations, les faits datent du 19 décembre dernier et ont été signalé comme "événement indésirable grave" de la part d'un membre du corps médical de l'hôpital.
Tout commence quelques jours plus tôt lorsque la nonagénaire est hospitalisée à l'hôpital gériatrique des Trois-Chêne, à Thônex. Elle se plaint de douleurs abdominales avec une baisse de son état général. Elle subit alors des examens, dont un scanner, qui permettent de diagnostiquer une péritonite avancée. Vu l'âge de la patiente et l'avancement de la maladie, décision est prise par les équipes médicales de ne pas l'opérer et de la laisser partir, moyennant des soins de confort. Une décision aussitôt contestée par une partie de la famille de la patiente qui fait appel au conseiller d'Etat de tutelle des HUG, Mauro Poggia.
"Alerté par un parent proche de la patiente, alors éloigné de Genève, dont les propos étaient l’expression non seulement d’une souffrance, mais également d’une rupture tant du lien de confiance que du dialogue avec le corps médical, je suis intervenu pour avoir des explications, comme il m’est déjà arrivé de le faire", nous explique l'édile MCG par écrit. Ce dernier prend langue avec le directeur des HUG, Bertrand Levrat. La nonagénaire est dès lors transférée aux Urgences de l'hôpital cantonal, sur le site Cluse-Roseraie, "uniquement pour poser un diagnostic précis, ce qui ne pouvait être fait aux Trois-Chêne", assure le magistrat.
Poggia présent sur place
Mauro Poggia fait lui-même le déplacement et rejoint la famille de la patiente. La nonagénaire est confuse et souffre d'insuffisance rénale et hépatique. Le service des urgences, celui de la chirurgie viscérale ainsi que les anesthésistes de garde arrivent aux mêmes conclusions que les équipes des Trois-Chêne: une chirurgie n'améliorerait pas le pronostic de la malade. L'opération est superflue.
"Apprenant par les proches que la situation relationnelle avec le corps médical s’aggravait, je me suis entretenu aussi bien avec le parent qui était à l’étranger, par téléphone, que directement avec un parent qui était au chevet de la patiente, pour tenter de comprendre pourquoi il y avait le sentiment que le corps médical s’était à tort résigné à voir la patiente décéder, affirme Mauro Poggia. C’est dans ce cadre, et avec l’accord de la famille, que des médecins se sont entretenus avec moi, mon intervention ayant été clairement circonscrite au rétablissement souhaité d’une relation de confiance avec les proches de la patiente. Étant donné qu’aucune bonne action ne reste impunie et que certains médecins sont encore pétris dans la culture du paternalisme, et supportent mal qu’on leur demande d’expliquer leurs options thérapeutiques, je n’exclus pas que l’on ait pu être contrarié par ma présence."
Finalement, le médecin adjoint de garde procède à l'opération. La patiente décédera le lendemain aux soins intensifs. Un épisode que résume ainsi Mauro Poggia: "Après discussion, les médecins ont décidé d’opérer la patiente, la famille ayant indiqué que telle aurait été sa volonté, et ayant accepté une issue fatale possible en cours d’opération."
Un événement indésirable grave signalé
Ces faits ont choqué plusieurs protagonistes médicaux de l'affaire. Il est en effet inhabituel que le ministre de tutelle de l'hôpital cantonal intervienne dans un cas particulier. Un médecin décide donc de signaler un "événement indésirable grave" à la direction des HUG. Il s'agit d'"un événement qui concerne un collaborateur, un visiteur ou un tiers, qui survient en lien avec l’activité de l’institution ou ses infrastructures et dont il résulte un grave préjudice à la santé ou à l’intégrité". Contactés, les HUG restent silencieux et renvoient à Mauro Poggia.
"Je ne suis pas informé des suites données à une annonce d'événement indésirable grave, et si une enquête devait être ordonnée, je me réjouis d'y être entendu, et de demander l'audition du proche de la patiente qui était présent durant tout l'entretien avec les médecins", déclare le conseiller d'Etat genevois. Celui indique d'ailleurs n'entretenir aucune relation ni sur le plan privé, ni sur le plan professionnel avec le parent proche de la défunte, ce dernier étant une simple connaissance. "Aucune instruction de ma part n'a été donnée au corps médical, et il n'y a eu aucune ingérence du politique dans le médical. Des affirmations contraires seraient calomnieuses."
@raphaelleroy