Le Conseil d'Etat genevois a présenté mercredi sa réforme cantonale de l'imposition des entreprises. Dans son projet, le taux d'imposition sur le bénéfice est fixé à 13,79%, identique à celui du canton de Vaud. La balle est maintenant dans le camp du Grand Conseil.
L'application d'un taux unique d'imposition aura son prix à Genève. Alors que les sociétés à statut, comme les multinationales, nombreuses au bout du lac, devront débourser un peu plus qu'aujourd'hui, les entreprises ordinaires verront leur imposition passer de 24,2% à 13,79%, engendrant de sensibles pertes fiscales.
Le gouvernement estime que le manque à gagner pour le canton s'élèvera dans un premier temps à 350 millions de francs par année et à environ 85 millions de francs pour les communes. Le Conseil d'Etat espère toutefois que l'économie locale profitera de la réforme et que la facture diminuera au fil du temps.
Immobilisme interdit
Genève ne peut de toute façon pas se permettre le luxe de tergiverser, selon l'exécutif. Les pays voisins pressent la Suisse de supprimer les sociétés à statut. "Nous sommes condamnés à nous entendre", a souligné le président du gouvernement Antonio Hodgers. Le statu quo conduirait, selon lui, à des pertes "plus importantes".
Dans son projet, le Conseil d'Etat a voulu minimiser le manque à gagner fiscal en limitant à 50% pendant 5 ans l'imputation de l'impôt sur le bénéfice à l'impôt sur le capital. Cette limitation touchera essentiellement les sociétés ordinaires. La mesure rapportera environ 42 millions de francs.
Le gouvernement a aussi assorti la réforme de deux mesures d'accompagnement à caractère social. Il souhaite ainsi faire passer à la caisse les employeurs avec un prélèvement de 0,07% sur la masse salariale au profit des crèches et des structures d'accueil de la petite enfance.
Le Conseil d'Etat s'engage également à soutenir le contre-projet à l'initiative "pour des primes d'assurance-maladie plafonnées à 10% du revenu ménager", pour soulager la classe moyenne. Le projet fait aussi un geste en faveur des communes, qui toucheraient 20% de la rétrocession de l'impôt fédéral direct que Berne versera au canton.
Avant de finaliser son projet de réforme de la fiscalité des entreprises, le gouvernement genevois a patienté jusqu'à ce que la situation se décante aux Chambres fédérales. "Nous devions attendre la base légale fédérale avant de dérouler la loi cantonale, c'est une question de cohérence", a noté M.Hodgers.
Pas de sous-enchère fiscale
Nathalie Fontanet, la conseillère d'Etat chargée des finances, a indiqué que le gouvernement, en fixant son taux d'imposition unique à 13,79%, n'avait pas opté pour un développement accru du canton. "Notre souhait est de conserver les entreprises qui sont déjà là". Genève ne veut pas se lancer dans "de la sous-enchère fiscale".
Les déductions dont pourront jouir certaines entreprises, comme celles, par exemple, qui investissent dans la recherche et le développement, seront peu nombreuses et n'excéderont pas 9%. Le taux d'imposition des bénéfices de ces sociétés ne tombera ainsi pas en dessous du seuil de 13,29%.
Le projet du gouvernement est transmis au Grand Conseil genevois. Il devrait être abordé en plénière lors de la session du mois de janvier. L'exécutif veut également soumettre la proposition aux électeurs genevois. Une votation pourrait être organisée en mai 2019, permettant ainsi un scrutin sur le volet fédéral et cantonal de la réforme.
Réagissant au projet, la Fédération des Entreprises romandes Genève (FER Genève) a rappelé dans un communiqué "la nécessité d'aménager la fiscalité genevoise dans les meilleurs délais". Elle a souligné que le canton de Genève était particulièrement concerné par cette réforme fiscale, cruciale pour préserver emplois et compétitivité.
Source ATS