La stratégie de déconfinement présentée jeudi par le Conseil fédéral est logique et cohérente, estime le professeur Didier Pittet, épidémiologiste aux HUG. Son succès dépendra du suivi des recommandations par la population.
Le calendrier prévu offre une bonne vision de l'épidémie, alors que celle-ci évolue par cycles de quinze jours. Il permet de s'adapter si la courbe épidémiologique, actuellement à la baisse, devait changer, estime le médecin-chef du service de prévention et contrôle de l’infection des Hôpitaux universitaires de Genève (HUG).
La décision du gouvernement se situe aux confins des besoins sanitaires et économiques. Mais elle aura également un impact psychologique. En autorisant dès le 27 avril la reprise des activités dans le domaine des soins à la personne et la réouverture des jardineries, le Conseil fédéral montre notamment qu'il y a "le début d'un bout du tunnel", affirme-t-il à Keystone-ATS.
Les gens à qui l'on demande de rester confinés auront un peu de plaisir sur leur balcon ou dans leur jardin. Quant aux entreprises concernées, elles auraient souffert si elles avaient dû rester fermées encore un mois de plus. La réouverture permet de relancer leurs activités moyennant le respect des règles de distance sociale.
Quant à la reprise de l'ensemble des activités des hôpitaux, "c'est l'évidence même", souligne le Pr Pittet.
Enfants peu affectés
Concernant la reprise des écoles, l'expert salue le fait que l'on recommence par l'école obligatoire. Les jeunes enfants sont peu affectés par la maladie. En outre, ils vont en général à l'école dans leur quartier, donc à pied. Seuls les adultes devraient dans un premier temps prendre les transports publics.
Adolescents et étudiants viendront dans une étape suivante, ce qui laissera aux entreprises de bus de prendre les mesures qui s'imposent (augmentation des cadences, gel désinfectant, éventuellement masques, etc.).
En outre, le retour à l'école permet également d'éviter une aggravation de la fracture sociale, note le Pr Pittet. L'école à la maison n'est pas possible pour tout le monde et cette fracture peut être très coûteuse, souligne-t-il.
Société responsabilisée
L'épidémiologiste salue par ailleurs le fait que le Conseil fédéral "responsabilise" l'économie en demandant à chaque secteur d'établir un plan de prévention des risques de transmission. "C'est une belle clé du succès", estime-t-il.
D'autant qu'elle change les habitudes des employés en les responsabilisant eux assi. Désormais, une personne qui se sent malade devra renoncer à aller travailler et se faire tester. C'est un changement sociétal, souligne l'expert.
A ses yeux, la réussite de cette stratégie dépend du respect des recommandations, mais aussi d'une forte communication de la part des autorités et de contrôles.