On entend beaucoup parler ces jours du livre-programme de Roger Nordmann sur la transition énergétique vers le solaire en Suisse. Qu’est-ce que cet ouvrage apporte de nouveau ?
Une vue d’ensemble. Et une vue d’ensemble résolument optimiste : les objectifs de décarbonisation en Suisse peuvent être rapidement atteints si l’on se concentre sur l’énergie solaire. En plus, un assainissement de l’activité économique sur ce plan va permettre de moins dépendre de l’Union Européenne dans l’approvisionnement énergétique. Ce n’est pas rien à une époque où la Suisse doit se protéger des pressions, menaces et chantages des grandes puissances. Comme bien d’autres Etats dans le monde d’ailleurs.
Ce n’est donc pas un hasard si ce livre sort maintenant.
Non, certainement pas. Le Lausannois Roger Nordmann est conseiller national, président du groupe socialiste aux Chambres, et l’on comprend bien qu’il s’agit d’une publication en année électorale. Elle s’intitule Le Plan solaire et climat. Mais on aurait tort de parler d’opportunisme : Nordmann est un spécialiste. Il préside Swissolar depuis des années. Une association de branche regroupant les entreprises actives dans les équipements solaires. Alors il s’agit bien de lobbyisme, et l’on peut même parler de bon lobbyisme.
Et en quoi consiste le plan solaire de Roger Nordmann ?
A admettre tout d’abord que l’énergie éolienne n’a pas d’avenir en Suisse. Elle en a certainement dans les régions plates du Nord de l’Europe, qui sont déjà largement recouvertes, mais pas en Suisse. Les paysages ont trop de valeur et les oppositions y sont bien trop vives. C’est donc sur le solaire qu’il faut se concentrer.
C’est déjà le cas aujourd’hui.
Oui, et la Stratégie énergétique 2050 soutenue en vote populaire il y a deux ans va plus ou moins dans ce sens. Mais c’est beaucoup trop lent. Depuis le temps que l’on en parle et qu’on le favorise, le solaire ne représente pas plus de 3% de l’énergie électrique. Or le nucléaire et le pétrole qu’il s’agit de remplacer couvrent aujourd’hui plus de 40% des besoins.
On attend aussi que les développements se soient stabilisés dans les technologies de stockage. C’est-à-dire les batteries.
Oui, mais il y a bien un moment où il faudra cesser d’attendre. Nordmann suggère d’importants investissements en attendant pour recouvrir de panneaux solaires tous les espaces publics disponibles : bordures des routes, autoroutes, voies de chemins de fer. Et les toitures des bâtiments publics. Il s’agirait de créer une production de base, allant au-delà de l’autoconsommation. Pour pouvoir, ou devoir développer les premiers réseaux de stockage qui seront la clé de l’électricité solaire du futur.
Ce qui requiert des financements publics importants.
Oui, comme ce fut le cas pour la construction des grands barrages et des grands tunnels alpins. Alors où trouver les fonds sans augmenter les prélèvements auprès des ménages et des entreprises ? Eh bien ce sera probablement l’un des thèmes-clés de la prochaine législature à Berne.