La Caisse cantonale vaudoise de compensation AVS est dans la tourmente. La CCVD est soupçonnée de graves irrégularités dans ses frais d'administration. Le Ministère public a été saisi. La directrice a été licenciée et les cinq autres membres de la direction suspendus.
La ministre de la santé et de l'action sociale Rebecca Ruiz s'est dit jeudi "profondément heurtée et choquée par la gravité des faits" concernant des "remboursements de frais scandaleux". Elle a toutefois d'emblée voulu rassurer la population: "aucune perte, dommage, ni préjudice n'est à constater pour les employeurs, les personnes affiliées et les bénéficiaires de rentes ou d'allocations".
Ce sont des dysfonctionnements de gouvernance et de suivi financier d'un projet de développement d'un logiciel informatique pour la gestion des pensions (iPension) qui ont mis la puce à l'oreille au Conseil d'administration de la caisse, sise à Vevey. Présidente d'office du CA, la cheffe du Département de la santé et de l'action sociale (DSAS) a aussitôt informé fin juin le gouvernement.
Le Conseil d'Etat a "immédiatement" chargé le Contrôle cantonal des finances (CCF) de réaliser un audit du projet en cause. Il a ensuite étendu cet audit au fonctionnement interne de la caisse et à l'examen des frais d'administration, à la suite de dénonciations "anonymes de collaborateurs et anciens collaborateurs" de la CCVD.
"Système organisé et opaque"
Les premières analyses du CCF ont fait état de "soupçons d'irrégularités à caractère pénal, s'apparentant potentiellement à une gestion déloyale, basée sur un système réellement organisé, complexe, cloisonné et opaque", a expliqué Mme Ruiz devant la presse. "Une machine" qui a même échappé à l'organe de révision.
Averti lundi dernier par une note d'urgence du CCF, le Conseil d'Etat et le Conseil d'administration ont saisi le Ministère public. Formellement, c'est le CA qui a déposé une plainte pénale.
A ce stade, la présomption d'innocence prévaut, rappelle le canton. Mais les dysfonctionnements relevés concernent "sur plusieurs années" des "dépenses excessives de la direction", notamment en termes d'aménagements de locaux et de frais professionnels annexes, soit des notes de frais de déplacements, d'hôtels et de restaurants.
Centaines de milliers de francs
Les montants se comptent potentiellement en plusieurs centaines de milliers de francs, a dit Mme Ruiz. Elle a aussi affirmé qu'il était "impossible à ce stade de communiquer plus d'éléments sur le périmètre et les conséquences des dysfonctionnements soupçonnés".
Le lien de confiance avec la directrice, en place depuis 2009, étant rompu, celle-ci a été licenciée sur-le-champ par le Conseil d'Etat "pour justes motifs". Un directeur ad interim a été nommé. Les cinq autres membres de la direction de la caisse ont été suspendus jusqu'à nouvel ordre et dans l'attente de résultats d'investigations complémentaires qui seront menées par le CA.
Le gouvernement a par ailleurs confirmé la poursuite du mandat d'audit du CCF. Le but est d'approfondir l'analyse de la gouvernance et du suivi financier du projet iPension ainsi que l'examen du fonctionnement interne et des frais d'administration.
Ce projet informatique implique plusieurs partenaires avec lesquels il y a eu "des tensions", selon Rebecca Ruiz. Il a débuté en 2016 et a engendré à ce jour des coûts de développement et d'investissement d'environ 13 millions de francs à la charge de la caisse, sur une enveloppe validée par le CA de 26 millions de francs, sans être à ce stade totalement implémenté.
Deux autres mesures
La suite du projet iPension devra être examinée à la lumière du rapport du CCF. Il n'est pas possible à ce stade d'en communiquer le calendrier ni les résultats, a prévenu la conseillère d'Etat.
Le CA prend encore deux mesures à l'interne: une enquête administrative pour établir le niveau de connaissance et de responsabilité des membres de la direction et leur devoir d'information au CA ainsi qu'un réexamen des modes et processus de gouvernance liés à la qualité, la quantité et la nature des informations qui auraient dû remonter de la direction au CA.
Pour rappel, la Caisse cantonale de compensation délivre notamment les prestations de l'AVS et les allocations APG (assurance perte de gain) pour les indépendants. Elle compte près de 300 collaborateurs et gère des flux financiers de l'ordre de 5 milliards de francs. Les frais de fonctionnement réguliers de la caisse se montent à 40 millions de francs par an.
Cet article a été publié automatiquement. Source : ats