Cédric Lenoir, avocat spécialisé en droit immobilier, associé de l’Etude LENOIR DELGADO & Associés.
Il fait encore très chaud pour un mois d’octobre mais le froid va nécessairement arriver et avec lui les éternels problèmes de chauffage dans les appartements. Locataires ou propriétaires, Cédric Lenoir, avocat spécialisé en droit immobilier, vous explique vos droits.
Commençons par les droits et obligations des locataires. Sachez tout d’abord que contrairement à ce que beaucoup de gens pensent, la loi ne prévoit ni de températures minimales obligatoires à respecter dans les appartements ni de périodes de chauffage obligatoires.
En réalité, les droits des locataires découlent de l’article 256 du Code des obligations qui dispose simplement que « Le bailleur est tenu de délivrer la chose à la date convenue, dans un état approprié à l'usage pour lequel elle a été louée ». Dans ce contexte, la jurisprudence a eu l’occasion d’établir qu’une température inférieure à 18 degrés constituait un défaut donnant potentiellement droit à une réduction de loyer. A noter encore que le bien-être subjectif du locataire n’est pas pertinent pour juger de l’existence d’un défaut.
Que faire alors si le bailleur tarde à allumer le chauffage ou si celui-ci est défaillant
La première chose à faire est d’en aviser le bailleur par écrit en lui demandant d’allumer le chauffage ou de le réparer pour qu’une température minimale de 18 degrés puisse être atteinte dans toutes les pièces de l’appartement. Sachez encore qu’il admissible et même recommandé que le chauffage soit diminué la nuit, entre 23h00 et 07h00, et qu’une baisse nocturne de la température n’est pas un défaut.
Et si le bailleur ne réagit pas ?
Il faut alors fixer par courrier recommandé un délai raisonnable au bailleur pour qu’il remédie à la situation en indiquant qu’à défaut les loyers seront consignés. A Genève, les loyers doivent être consignés auprès de la caisse du Palais de justice et dans les autres cantons romands se sont soit les banques cantonales soit toutes les banques. Vous devrez ensuite saisir la commission de conciliation en matière de baux et loyers dans un délai de 30 jours dès l’échéance du premier loyer consigné pour qu’un tribunal puisse ultimement décider si la consignation est justifiée. Dans ce contexte il faut être très prudent car il n’est pas toujours évident de prouver que les températures minimales ne sont pas respectées, de sorte qu’il faut vraiment éviter d’en arriver là et privilégier la discussion avec son bailleur ou faire preuve d’un peu de patience.
Et s’agissant des propriétaires d’appartements, comment ça se passe ?
Si vous êtes propriétaire d’un appartement en propriété par étage cela sera à l’administrateur de la copropriété de s’assurer que le chauffage soit allumé à temps dans l’immeuble. Théoriquement, s’il ne s’exécute pas, vous pourriez saisir un juge pour qu’il ordonne à l’administrateur de prendre les mesures nécessaires pour allumer le chauffage mais il est rare d’en arriver à une telle issue. On pourrait aussi imaginer que le copropriétaire prenne lui-même les dispositions pour que l’entreprise de chauffage vienne le mettre en route au titre des mesures qu’on appelle « urgentes ».
Peut-on se plaindre d’avoir trop chaud dans un appartement ?
S’il fait chaud à l’intérieur alors qu’il fait froid dehors, oui. Dans un arrêt récent (25 avril 2017), le Tribunal fédéral a considéré comme un défaut le fait qu’il faisait entre 23 et 25 degrés dans l’appartement, chauffage éteint, alors qu’il faisait 3 degrés dehors. Ce genre de problème peut survenir avec les nouveaux immeubles dit « Minergie » dans lesquels il est difficile de régler la température, le soleil pouvant suffire à atteindre des températures élevées même sans chauffage.