Le Forum mondial sur la gouvernance d’internet s’est achevé hier à Paris. Il a lancé un appel pour la confiance et la sécurité dans le cyberespace. Est-ce que ça remet en cause les projets de convention numérique permanente à Genève ?
On doit certainement se poser la question. Mais sans trop d’alarmisme quand même. L’Appel de Paris pour la collaboration des Etats et des entreprises dans la sécurité du web a été signé par plus de 350 entités dans le monde. Dont les inévitables Google, Facebook, Samsung et Microsoft. Et puis des Etats, dont la Suisse.
Il s’agit de se mettre d’accord sur un certain nombre de règles. Sur la non-prolifération d’instruments numériques dangereux. Sur la fin des ingérences dans la vie politique des Etats. En périodes électorales en particulier. De faire en sorte également que les entreprises attaquées puissent recourir à une autorité reconnue pour se défendre et faire valoir leurs droits.
Eh bien c’est justement le rôle que veut jouer Genève. Là, on a plutôt l’impression que c’est Paris qui est en train de prendre le dessus.
Parce que c’est Paris… et que l’Appel de Paris a rassemblé 350 signataires. L’an dernier, une démarche similaire à Genève n’avait engagé qu’une trentaine de multinationales. Ça semble bien peu tout d’un coup.
Mais il s’agit de deux choses assez différentes. Ce que Genève veut obtenir, c’est la localisation d’une convention permanente. Le centre mondial de la gouvernance du web en quelque sorte. La Forum de Paris cette semaine, c’était un grand rassemblement ponctuel. Il se reproduira d’ailleurs l’an prochain, mais à Berlin.
On imagine quand même que Paris ou Berlin se verraient bien accueillir un jour la gouvernance permanente du web. Est-ce que Genève peut faire le poids face à une telle concurrence ?
C’est bien la question. Et elle reste certainement très ouverte à ce stade. Le Forum de Paris a été supervisé par les Nations Unies. Mais l’appel brandi par le président Macron n’a été signé ni par les Etats-Unis, ni par la Chine, ni par la Russie.
Or on voit mal une convention permanente efficace sans le soutien de ces trois superpuissances. Et par les temps qui courent, on voit plus mal encore que leur adhésion décisive puisse être obtenue sous le leadership de la France, de l’Allemagne, voire de l’Union européenne. La Suisse semble avoir un profil tout de même plus consensuel.
Alors il faut que Genève monte en puissance dans cette affaire. Et rapidement.
Sauf qu’il ne peut guère s’agir de Genève toute seule. C’est clairement à la Confédération d’agir pour Genève. D’agir auprès des Nations Unies en particulier. Parce que si quelque chose se fait à l’échelle du monde, c’est bien de ce côté-là que ça se jouera.
Il semblerait tout de même assez naturel et facilitateur que la gouvernance d’Internet fonctionne comme une sorte d’agence de l’ONU. La question de sa localisation interviendrait dans un second temps. Et là, là seulement, Genève aurait des chances. Bien que toutes les agences des Nations Unies ne soient pas basées à Genève, entendons-nous bien.