La mobilisation des gymnasiens pour que les autorités décrètent l’urgence climatique.
Cela fait longtemps qu’on n’avait pas assisté à un mouvement de cette ampleur, du moins en Suisse romande. Cela me rappelle les manifestations du Comité action cinéma, le CAC, qui, au tout début des années septante, protestait à Lausanne contre l’augmentation du prix d’entrée dans les salles de cinéma ! Aujourd’hui, et c’est un peu dommage, on partage le visionnement de films en comité restreint, sur le petit écran. Mais il n’est plus question de prix d’entrée dans les salles obscures, mais d’un sujet autrement plus sérieux, l’avenir de notre planète.
Adhérez-vous complètement aux revendications des jeunes manifestants ?
Sur le fond, ils ont complètement raison. Qui d’ailleurs pourrait prétendre le contraire. Leur impétuosité est toutefois teintée d’une certaine candeur. Renoncer aux énergies fossiles d’ici 2030, c’est une revendication à la Pyrrus : demander tout pour ne rien obtenir. Car on voit mal le parc immobilier, pour le chauffage, et le parc automobile, pour la mobilité, se passer totalement des énergies fossiles dans à peine plus de dix ans. Ce n’est pas très réaliste.
Un autre aspect de cette démarche vous dérange ?
Effectivement, ces jeunes gens affirment avec la détermination de la foi que les changements individuels c’est bien, mais qu’il faut des mesures globales. Encore faut-il mettre tous les acteurs et les pays d’accord. C’est bien l’objectif des conférences sur le climat. Celles-ci font progresser la cause, mais trop lentement au goût des manifestants. Ils oublient tout simplement que l’effort requis n’est pas ressenti de la même manière partout et par tous. A l’évidence, il est plus facile de réduire la voilure et d’agir dans les pays développés que dans les pays défavorisés, dont la population aspire elle aussi à sa part de confort.
A votre avis, la démarche individuelle prime
En tout cas dans nos contrées. Car il n’est pas nécessaire d’une COP pour aller de l’avant. Les petits ruisseaux, c’est bien connu, font les grandes rivières. C’est bien par une prise de conscience et des actes dans son environnement proche qu’on parviendra à lutter contre le réchauffement climatique. Pourquoi par exemple prendre l’avion pour des voyages d’études dans des capitales ? Ne serait-il pas plus indiqué de faire des échanges avec des classes de Suisse alémanique, histoire de redécouvrir la richesse de la Confédération et d’apprendre la langue de l’autre ? Cette démarche me paraît vitale à l’heure où l’enseignement du français est de plus en plus remis en cause par les cantons d’outre-Sarine.
Vous pointez aussi le commerce en ligne
Evidemment, lorsqu’on parle de climat et d’énergies fossiles, je ne peux m’empêcher de relever certaines contradictions. Le commerce en ligne va à l’encontre de la volonté manifestée dans la rue. Si un achat peut être opéré en quelques clics, le résultat est un cortège de camions et de camionnettes à travers le pays. Et si l’acheteur évite le déplacement à la commande, il n’échappe pas aux files d’attente lorsqu’il faut renvoyer le produit. Et que dire des géants du commerce sur la toile qui détruisent les invendus pour réduire leurs stocks ? Je pense que les jeunes manifestants, et nous tous avec eux, devrions privilégier la proximité. Non seulement pour les achats, mais aussi pour les loisirs. Même si les pistes de ski du Jura sont moins vertigineuses que celles des Alpes. On redécouvrirait à coup sûr la richesse géographique et les habitants de ce pays.
https://www.radiolac.ch/podcasts/les-signatures-21012019-081841/