Le chantier de la gare de Lausanne doit être repensé pour mieux tenir compte des besoins futurs. Cela devrait repousser la fin des travaux à 2037, soit quatre ans et demi plus tard que prévu. Canton, Ville et lobby romand du rail sont fâchés.
Le retard du chantier s'explique par la nécessité de retravailler le dossier sur des questions de statique du site, comme cela a été demandé par l'Office fédéral des transports (OFT). Mais ce n'est pas l'unique raison. Le projet doit être revu plus largement, afin de tenir compte de l'évolution du nombre de voyageurs.
Le nouveau concept prévoit ainsi un élargissement des quais. "Nous intégrons la demande du futur, ce qui n'avait pas été suffisamment fait à l'époque", a affirmé vendredi Vincent Ducrot, le patron des CFF, devant la presse au siège régional de Renens.
Le Fribourgeois a rappelé que le projet initial, imaginé en 2010, avait été le fruit d'un compromis. Il avait été élaboré avec des quais plus étroits pour éviter la démolition supplémentaire d'immeubles au sud de la gare. "Nous avons été rattrapés par ce compromis", a-t-il reconnu.
Pour éviter une saturation prématurée, les CFF et l'OFT ont préféré redimensionner les travaux pour bénéficier "d'une gare qui fonctionne sur le long terme", a ajouté M. Ducrot. C'est en diminuant l'entraxe des voies, soit la distance entre deux voies, que les quais pourront être élargis. Cet entraxe passera de 4,2 m à 3,8 m.
Calendrier remanié
Selon le nouveau calendrier du chantier, les travaux en sous-sol de la place de la gare démarreront en avril 2024. La transformation des quais devrait suivre dès 2026 avec une mise en service par étapes entre 2030 et 2036. L'aménagement des passages inférieurs devrait se terminer en 2037.
Le report des travaux est "regrettable, mais il n'y a pas d'alternative", a estimé Peter Füglistaler, le directeur de l'OFT. "Nous préférons avoir des installations sûres et viables, même si elles arrivent plus tard, plutôt qu'une gare qui n'est pas adaptée".
Les surcoûts ne sont pas encore connus. Mais M. Füglistaler a assuré qu'il y avait "des réserves" dans le crédit-cadre octroyé pour lancer le chantier. "Le projet est financé et il n'y a pas de retour en arrière possible", a-t-il assuré.
Déception et inquiétudes
Si les CFF et l'OFT refusent de parler de fiasco - "cela serait mal connaître la complexité des grands projets", a affirmé le patron des CFF -, ils se sont néanmoins attiré de nombreuses critiques.
Le Conseil d'Etat vaudois et la Municipalité de Lausanne ont dit leur "grande déception et inquiétude". Ils ont été mis devant le fait accompli, selon la conseillère d'Etat en charge des transports Nuria Gorrite. Ils demandent désormais des garanties pour assurer le fonctionnement du noeud ferroviaire lausannois et de la gare.
Lors d'un point de presse séparé, Mme Gorrite a affirmé avoir appris mercredi soir les nouvelles annonces. "C'est plus qu'un nouveau planning, c'est une très grande reprise du projet initial", a-t-elle affirmé. Ce qui a été présenté aujourd'hui est un nouveau concept, mais pas encore un nouveau projet", a-t-elle bien souligné.
Horizon 2040?
La ministre s'est dite inquiète d'une éventuelle nouvelle mise à l'enquête qui pourrait retarder encore le chantier et a évoqué un possible horizon 2040. "Il y a encore un certain nombre d'inconnues".
Canton et Ville reconnaissent toutefois que le nouveau projet apparaît "comme une amélioration par rapport à l'ancien", même si cette refonte est "tardive". Mais cette rallonge de treize années est un "immense décalage avec les besoins de la population en termes de mobilité et des enjeux climatiques", a aussi jugé Mme Gorrite.
Soucieuse de ce chantier sans fin, la conseillère d'Etat a osé la formule "c'est le trou de Tolochenaz mais planifié", en référence à l'incident survenu en novembre 2021 sur la ligne Lausanne-Genève qui avait paralysé puis limité le trafic ferroviaire pendant quelques jours.
Analyser les "manquements"
Pour la Conférence des transports de Suisse occidentale (CTSO), le nouveau délai présenté par les CFF et l'OFT "sonne comme un nouveau coup de frein au développement de l'offre en transports publics de la Suisse occidentale". C'est "inadmissible", selon elle.
OuestRail estime que ce retard est "incompréhensible". Le lobby romand rappelle que ce projet, débuté en 2009 avec la signature de la convention Léman 2030, prévoyait une mise en service à l'horizon 2025. "Le retard est déjà de près de 15 ans et rien ne garantit que les besoins pour les 50 prochaines années soient couverts", s'inquiète-t-il.
Pour OuestRail, les CFF et l'OFT doivent proposer des solutions de compensation pendant cette phase de travaux. Il souhaite aussi que "les manquements dans la gestion de ce projet" soient analysés de manière indépendante par le Parlement.
"Ces annonces de retard à répétition sont choquantes, illustrent l'incapacité de l'OFT et des CFF à gérer des projets de grande ampleur et révèlent un grave manque de considération pour la Suisse romande. Ils se moquent aussi de la population lausannoise", ont réagi six partis lausannois dans un communiqué interparti, de gauche et de droite.
Cet article a été publié automatiquement. Source : ats