La grève des métiers du bâtiment à Genève a été très suivie hier. Elle est reconduite aujourd’hui, avec une nouvelle manifestation bloquant le centre-ville. Vous François, vous dites que ce genre de perturbation n’a aucun sens.
Et je parle effectivement de manifestation, non pas de grève. Et de manifestation bloquant le trafic au centre ville. Aux heures de pointe de surcroît. Avec de sérieuses perturbations jusqu’en périphérie. Quel est le but recherché dans le fond ? Faire pression sur les dirigeants des entreprises de construction ? Mais cette fin justifie-t-elle des moyens aussi disproportionnés?
Quel rapport d’ailleurs entre un conflit social dans les métiers du bâtiment et des milliers de personnes en ville Genève ? Qui devront se lever plus tôt. Qui devront expliquer que leur retard n’est pas de leur faute. Ou qui devront reporter un rendez-vous qui avait été tellement difficile à obtenir.
Manifester peut être un moyen de sensibiliser le public. Ou de montrer sa force et sa détermination aux employeurs.
Dans ce cas-là, j’ai de sérieux doutes sur l’efficacité. De quoi parle le public depuis hier à propos des métiers du bâtiment, à votre avis ? De la retraite à 60 ans. Digne des régimes spéciaux en France. Des salaires minimaux élevés, des compensations, des autres conditions sociales tellement enviables.
Je ne suis pas sûr que tous les gens comprennent très bien pourquoi ils devraient payer de leur personne. Pour la défense de ces lointains acquis sectoriels de première classe ? Ça incite d’ailleurs à observer les chantiers aujourd’hui, vous savez : la pénibilité n’y a plus l’air tellement plus élevée que dans pas mal d’autres métiers.
Ce que vous dites en fait, c’est que les métiers du bâtiment pourraient aussi se contenter de faire la grève.
Oui en quelque sorte, sans chercher à exercer des nuisances sur toute la république. Il y a un droit de grève en Suisse. Une grève peut être tout à fait légitime. Je ne sais pas si c’est le cas en l’occurrence. Mais une grève des maçons, oui… c’est assez poétique comme formulation. Il y a de toute manière de quoi défrayer suffisamment la chronique pour intimider des employeurs.
Parce que c’est bien cela qui est recherché dans la grève au sens moderne. Davantage que l’épreuve de force passant par des pertes de revenus partagées. Entre gentils employés et méchants employeurs.
Mais l’on ne parle pas de service public, évidemment. Parce que là, la grève est rarement légitime. Et souvent interdite d’ailleurs. Mais pas dans les transports publics à Genève - une autre spécialité locale depuis quelques années. Quand les TPG se mettent en grève, ce sont les métiers du bâtiment puissance dix. Un énorme abus de pouvoir qui empoisonne la vie de milliers de… comment dire, oui : de milliers d’innocents. Dont certaines et certains n’ont pas de voiture. Pas parce qu’ils sont écolos, mais parce qu’ils n’en ont pas les moyens, tout simplement. In-sen-sé. Voilà à peu près où l’on en est.