Pierre Maudet est encore conseiller d'Etat. Le gouvernement genevois l'a maintenu en poste ce jeudi. Il a certes perdu encore un peu de ses prérogatives (présidence, police, aéroport), mais il est encore en vie. Et en politique, c'est l'essentiel.
Je le dis tout de go: le Conseil d'Etat genevois se trompe quand il pense préserver les institutions en retirant des dossiers phares à son collègue PLR. Au contraire, il déstabilise encore un peu plus le canton de Genève. "Cette réorganisation n'est pas une sanction", a souligné ce jeudi le nouveau président du Conseil d'Etat genevois, Antonio Hodgers. Cette précision, loin de rassurer, est de nature à plutôt inquiéter. Quel crédit peut-on désormais accorder à un collège qui refuse de sanctionner l'un des siens alors que celui-ci a gravement fauté? Va-t-on, lors de la présentation du programme de législature ou du budget, faire comme si de rien n'était? Comme si nous avions affaire à un collège uni, travaillant main dans la main? Quelle hypocrisie!
Pierre Maudet a menti. Il a menti à ses électeurs, il a menti aux médias, il a menti à son parti, il a menti à la commission de contrôle de gestion du Grand Conseil, il a menti à la justice et il a menti à ses collègues. Comme si cela ne suffisait pas, Pierre Maudet a "violé les règles du Conseil d'Etat en matière de procédure protocolaire et de non acceptation de cadeaux", selon les termes du communiqué de l’Exécutif de ce jeudi. Enfin, Pierre Maudet sera bientôt prévenu par la justice genevoise d'acceptation d’un avantage.
Ce dernier point est important. J'entends et lis ici et là des appels à respecter la présomption d'innocence et à laisser travailler la justice. Très bien, mais le sujet n'est plus là. Au fond, que Pierre Maudet soit condamné ou non dans le futur n'a aujourd'hui plus d'importance. Evidemment, s'il devait être reconnu coupable, sa carrière politique s'arrêterait net. Mais même s'il devait être blanchi, quel crédit les électeurs, sa famille politique, les députés, les médias, le Conseil d'Etat lui accorderaient encore? Auraient-ils toujours envie de partager leur destin avec lui?
Le Conseil d'Etat a-t-il pris la mesure de cet état de fait? On peut en douter. Se refusant à se "substituer à la justice", il élude ces questions préférant maintenir son collègue dans le jeu. Il fait le pari couard que le temps fera son oeuvre. Mais le temps n’arrangera rien à l’affaire!
De son côté, Pierre Maudet s'enferre dans le déni. Il répète à qui veut l'entendre qu'il a aujourd'hui encore l'énergie et la capacité à gouverner, qu'il n'est pas temps de "déclarer forfait". Il est persuadé que la procédure pénale l'absoudra. Vaines idées.
C'est vrai: le mensonge n'est pas puni par la loi. Mais il est rédhibitoire en politique. Surtout lorsqu'il a été organisé collectivement en amont, comme le laisse supposer le Ministère public. Vu de Genève et désormais de Berne, les faits sont inacceptables. La confiance est rompue. Le bateau prend l'eau. Le capitaine Maudet doit prendre ses responsabilités. Procédure pénale engagée ou non.